COMMENT ON CONSTRUIT UN MACRON : L’EXEMPLE DU POINT.


Voilà le Canard Enchaîné, notre palmipède, qui s’est attaqué à François Fillon et aux émoluments non-fictifs reçus par son épouse. Bravo ! Mais on déplore que ce même journal satirique soit beaucoup moins offensif sur Emmanuel Macron et soit très/trop discret sur ses financements (pactole de Londres  et, dernièrement, de Beyrouth). 
Le citoyen-BiBi a donc tenté d’y voir un peu plus clair sur les affaires du candidat ex-banquier. Facile puisqu’il ne se passe pas une heure sans que les Médias du Grand Capital ne le propulsent en icône. L’hebdomadaire Le Point (N° du 19 janvier) lui consacre sa couverture et 48 pages d’adoration et d’agenouillement. Allez, hop, on y va voir de plus près.

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Comme Macron n’est «ni de droite, ni de gauche», il a bien fallu lui trouver un qualificatif. Dans la NovLangue libérale, il y a toujours instantanément des catégorisations. Ainsi du mot «populiste» attaché au Front National et au courant mélenchonniste. Commode ce mot car cela permet ensuite à l’«analyse» de rester dans l’Entre-Soi libéral (de la Droite dure mais «républicaine» à la Gauche acceptable jusqu’à Hamon).Commode cette dénomination mais fausse puisque le FN reste et restera toujours attaché au Grand Capital.

«Progressiste».

Alors advient le sublime adjectif pour notre Banquier-rebelle : «progressiste». Avec ce point nominal, en avant Marche pour la Propaganda 2017 ! Pour étayer tout ça, Le Pointrappelle les braves toutous de la Niche à Pinault, indéboulonnables éditocrates qui lancent, dès leur entame d’articles, des flèches contre… les «médias complaisants». Ces derniers – paraît-il – disent beaucoup de mal de leur poulain ! (Ah ? Des noms ! Des noms !). Ces indécrottables agités du microcosme médiatico-parisien, habituels empaffés du PAF, nommons-les : Franz-Olivier Giesbert et Philippe Tesson.

Le Cinoche des éditocrates.

Tous deux nous emmènent au… cinéma !

Avec FOG, regard extasié devant l’arrivée du Messie-Macron, on est à Hollywood. «Macronressemble au prototype hollywoodien du jeune homme fortuné, propre sur lui, à qui tout réussit. Une sorte de Richard Gere».

Philippe Tesson, lui, a d’autres hallucinations, plus européennes. Il va pêcher ses comparaisons dans le cinéma italien, rêvant son Macron en un «prodige» qui ressemblerait trait pour trait au héros du «film Théorème de Pasolini» ! Aïe ! Aïe ! Aïe !

Détaillons les éléments biographiques retenus par notre Chien de Garde.

  • – EM a «une origine authentiquement populaire».
  • – Son «ascension a été acquise par le mérite».
  • – Il a une «éducation exemplaire dans le respect des valeurs morales et intellectuelles traditionnelles».
  • – «Sa conquête de liberté par un savoir étendu».
  • – Il a «l’ambition de servir le bien public».
  • – Il faut apprécier «son entrée dans le Réel».

Parler Finances ? Mon cher, vous n’y pensez pas.

Ne comptez pas lire des infos sur ceux qui… comptent : les financiers, pivots de la Guerre 2017, tireurs de ficelles de la marionnette macronienne mais comptez sur BiBi :

Voilà Véronique Bolhuis, compagne de Laurent Bigorgne (directeur de l’Institut Montaigne aux 100 patrons abonnés, dealer d’infos numéro 1 du Monde), voilà Benjamin Blaise-Griveaux ( ancien conseiller DSK), Bernard Mourad (qui lui ouvre ses coffres-forts franco-libanais) et voilà encore Christian Dargnat (BNP), Emmanuel Miquel(Ardia), Stanislas Guerini (Elis). Sur ceux-là, côté du Point, c’est évidemment motus et bouche cousue.

Cependant la «journaliste» Charlotte Chaffanjon va nous en dire un mot après avoir été éblouie par la visite du siège de Macron, «1000 m² qui courent sur 3 étages d’un immeuble moderne du 15ème arrondissement». Qui paye, on ne sait mais elle donne du chiffre : «4 millions de dons venus de 11.000 donateurs» et rajoute cette «info» : «L’équipe comptait faire campagne avec un budget total de 16 millions d’euros». On s’attendrait à ce que notre «journaliste» pose la question du pactole des 12,75 millions d’euros récoltés à Londres en juin dernier, à ce qu’elle nous parle du voyage au Liban du candidat, des possibles 120.000 euros pris sur l’argent public, des repas à Beyrouth (repas compris entre…10 à 15.000 euros) etc. Ben non, elle ne fera qu’enregistrer la Sainte Parole macronienne distillée par ses Communicancants. Une recherche plus avancée ? Vous n’y pensez pas. Tout est bien qui finit bien, voilà la groupie du Point qui lance un dernier cri de joie : «Emmanuel Macron peut se rêver en César !». Propagande ? Naaann ! Qui a dit Propagande et bourrage de crâne ?

Le lèche-bottes n°1 : Fabrice Luchini.

Discrètement mais efficacement, le Dossier du Point fait appel aussi à la diversité starisée. On va pécher l’Acteur dont la Diction est le fonds de commerce (Fabrice Luchini), on va battre le rappel de quelques intellectuels connus ou de seconde main et, en dernier, on écoutera la parole des experts puis celle des journaleux-maison. Détaillons :

Un arrêt s’impose sur l’inénarrable Fabrice Luchini, si heureux et si flatté de jouer dans la Cour des Grands. Le voilà, entremetteur, courbant l’échine, invité aux dîners de ses Idoles : un coup chez Macron, un coup chez Hollande. Ce cher Fabrice qui leur récite du Flaubert pendant que l’admirable ami Emmanuel lui parle du Misanthrope de Molière. Dépassés les dîners avec Davet et Lhomme !

Extrait du Point : «Nous sommes au cœur de l’automne 2014. Macron reçoit à déjeuner Fabrice Luchini. Eté 2015 : Luchini lui prête sa maison de l’île de Ré où Macron commence à écrire «Révolution». Allez, on ne peut quitter notre Fabrice sans se payer une de ses dernières saillies (qui rejoint ici celles du clown FOG) :

«Macron est mystérieux. Il faut l’être pour avoir cette folie de penser qu’on peut agir sur le réel».

Historiens et histoire d’en rire.

Citons ensuite Virginie Girod, historienne aux travaux obscurs, convoquée elle aussi par Le Point. Elle a trouvé un os à ronger, mettant en rapport et en parallèle Macron avec un certain…. Quintus Naevius Sutorius Macro, préfet de prétoire, promu par l’empereur Tibère en 31 avant JC. (Non, je n’invente rien ! J’en ai même perdu mon latin !).

Pour la Propaganda Macron, il faut ratisser large. Et pour ça, ils sont allés chercher une pointure, l’historien Marcel Gauchet. Attardons-nous sur cet extrait proprement ahurissant  (Il parle de… Macron, hein !) :«C’est la première fois dans ce pays, dit-il, qu’un individu est capable d’entraîner derrière lui une foule de gens venant de partout, depuis ce mystérieux sentiment qui a fait que des gens sont allés à Londres en 1940». Plus à genoux que Marcel, moi, je n’ai pas trouvé.

Sondage.

Pour faire encore plus sérieux, ce dossier serait incomplet sans l’ajout d’un sondage. Cette fois, c’est l’IFOP qui nous renseigne. Combien de personnes interrogées sur 44 millions d’électeurs ? 961 contactés par téléphone ! Où l’on voit que Benoit Hamon est derrière Valls et juste derrière cette pauvre NKM.

Les inévitables «Experts».

Enfin, il y a les experts qui occupent 4 pages. Deux fines lames de la politologie. ENA, Sciences-Po of course convoqués.

  1. Gérard Grunberg (dont j’avais parlé ici, directeur émérite au CNRS-Science Po et défenseur acharné d’u certain Cahuzac ).
  2. Jean-Louis Bourlanges (ENA, IEP Paris, France Culture etc). «Un analyste de la vie politique attentif et toujours attendu» écrit l’Opinion. Bon… allons voir ce que disait notre politologue attentif sur la Primaire de la Droite : «Alain Juppé, c’est une force tranquille installée en altitude. Son pari, c’est que sa sagesse, conquise de haute lutte contre l’adversité, entre en résonance avec la maturité d’un pays». La, la la la… hé hé good bye.

Finir en beauté.

Et pour finir en beauté, une vieille connaissance  , le journaleux de la volière Pinault : Saïd Mahrane. Macron ? s’interroge t-il. Réponse : «Un progressiste !». Et pour suivre la lignée de notre ex-banquier, pour parcourir le rayon Gloire et Beauté de l’Histoire humaine (rien de moins !), il nous faudra suivre tous les antécédents progressistes du Sieur Macron.

Notre toutou de chez Pinault égrènera donc sans ciller – Tenez-vous bien – Georges Bernard Shaw, Hésiode, Rabelais, Descartes, Diderot, Condorcet, Jaurès et Blum.

Non, chers lectrices et chers lecteurs, vous ne rêvez pas.

Nous sommes ici au Point (n° du 19 janvier 2017 – n° à droite).

Et encore non, on n’est ni à Moscou, ni à Pékin mais à Paris. Et je peux vous certifier qu’aucun Communiste russe, aucun Commissaire de la Pravda, aucun Garde Rouge n’a débarqué ces jours-ci sur les Champs-Elysées.

JANVIER 26, 2017   BIBI  

http://www.pensezbibi.com/categories/revue-de-presse/comment-on-construit-un-macron-lexemple-du-point-19164

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